Comme je l'avais dit plus haut, je suis née avec une cuillère en argent dans la bouche. J'ai vu le jour en 1582 à Saint-Pétersbourg en Russie. Vu mon nom, on y croit pas vraiment, mais je l'ai changé. Ma famille était noble, même plus que cela. Vous devez connaitre cette chère Anastasia Romanova, et bien sa grand-mère était une cousine assez proche. Donc vous comprenez également que mes caprices soient légitimes. Tout m'a toujours été dû.
A l'époque de ma naissance, le Tsar était le fils d'Ivan le Terrible, et la famille royale était loin d'être aimée. Oncle et général de Michel Ier - premier Tsar sous la dynastie des Romanov - mon père, Patya Romanov, avait toujours préféré vivre loin du palais pour préserver sa femme et ses enfants de ce trouble dû au règne d'Ivan. Cependant, il ne pouvait pas se passer du luxe qui lui était dû, alors que le peuple mourrait de faim et de froid. Quand j'y pense, tant pis pour eux. Je vous passe les détails de mon enfance. Notez seulement que j'ai eu la vie facile, entourée d'une famille aimante, riche, imbu de leur personne et supérieure à la petite gens alors qu'elle n'était que des conseillers.
Mon adolescence ne fut pas a même. Le règne des Romanov commença peut après ma naissance, et les choses devinrent encore plus simple pour nous. Je jouais souvent dans la neige avec la grand-mère d'Anastasia. Nous étions jeunes et insouciantes. Jamais nous aurions pensé qu'elle finirait femme de Tsar et moi immortelle.
1600 : St. Pétersbourg, Russie
Je rentrais du palais avec mon plus grand frère âgé de 24 ans. Il fumait sa pipe et je le regardais faire, mains dans les poches. Il semblait pensif et sans avoir à lui demander je savais ce à quoi il pensait. Quand on avait quitté la maison plus tôt dans la soirée, il s'était disputé avec nos parents à propos de la succession. En tant qi'ainé de la famille, il devrait prendre la relève de papa au côté du Tsar. Cependant, il n'en avait pas envie. Il rêvait de voyager, de voir du pays. Il n'aimait pas sa condition de noble, et il avait craché au visage de notre père qu'il préférait mourir plutôt que de continuer à vivre ainsi au détriment du reste de la population. Malgré ses idéaux controversés pour es époques, et surtout contraires au miens, j'admirais Nikita. Il avait une volonté de fer et ne se laissait jamais marcher sur les pieds. Je tenais beaucoup de lui niveau caractère. Arrivant devant chez nous, la porte était grande ouverte. Nous pensions tout d'abord à de vulgaires pilleurs, mais nous étions loin de nous douter de ce que c'était réellement.
_ Attends-moi ici Lana !
Mais...Je n'eus pas le temps de dire autre chose qu'il pénétra dans la maison pendant que j'attendais toute seule dans le froid. Loin d'avoir peur pour ma personne, j'avais peur mon frère. Je ne portais pas le reste de ma famille dans mon coeur car nous étions trop différents. Mais Nikita et moi étions presque jumeaux. Nous nous quittions que rarement et il me protégeait comme une lionne protège ses petits. Je trépignais d'impatience devant la porte, essayant d'apecevoir de la lumière, un bruit. Le seul qui me parvint fut un cri de détresse dans lequel je crus reconnaitre mon prénom. Sans vraiment réfléchir je poussais doucement la porte entrouverte et pénétrais à mon tour dans ma demeure.
Nikita, où es-tu ?Lentement, mes sens en alerte, j'ôtais mon chapeau et mon manteau que je laissais tomber à terre avant de moi-même chuter en glissant sur un liquide. A la lueur de la bougie je reconnus du sang et le mien se glaça. Je ne savais pas ce qu'il se passait ici. Une chose était sûre, il aurait été préférable que je m'en aille. Je continuais d'appeler mon frère. Mes pas me guidaient je ne savais trop où, mais je continuais d'avancer. Je devais trouver Nikita. Mon coeur battait la chamade et je n'avais pas vraiment peur. Tout ce mystère qui entourait ce silence m'excitait plus qu'il ne m'effrayait.
Arrivant près des chambres, un cri étouffé m'alerta. Prenant une grande inspiration, je poussais la porte en bois et entrais dans la pièce. Là, à la lueur de la bougie, je découvris mon frère, les yeux grands ouverts, les pupilles dilatées par la peur, étranglé par un bras inconnu qui semblait s'abreuver à son cou. De fines gouttes de sang semblaient dégouliner de celui-ci. Je retins ma respiration et mis ma main devant ma bouche. Au lieu de fuir, je restais ainsi un moment, silencieuse jusqu'à ce que l'homme lève les yeux vers moi. A cet instant, je n'y réfléchis pas à deux fois et pris mes jambes à mon cou. Etait-ce le sort qui m'était réservé également ? Je me dirigeais rapidement dans les écuries derrière la maison, sans prendre le temps de repasser dans le salon pour récupérer mon manteau alors que le froid de Novembre gelait les imprudents. Je courus le plus vite que je pus, les larmes coulant sur mes joues alors que je revoyais le regard vide de mon frère.
Tandis que je me croyais sauvée en pénétrant les écuries, je fus rapidement projetée au sol et plaquée par un corps lourd et dur. On venait de me lancer un cadavre ? On me retourna et je tombais nez à nez avec mon assaillant. Son regard était presque aussi mort que celui de mon frère, la rage en plus. On aurait dit un fou. Sans me laisser surprendre, je me débattis du mieux que je pus, frappant, griffant, donnant des coups de pieds. Lisait-il la peur dans mon regard azur ? J'en doutais. Je n'avais pas peur de lui. J'étais en colère. C'était ça. Il venait de tuer la personne, la seule, dont j'étais proche. Je lui en voulais pour ça et je le frappais dans cet optique. Mais mes coups ne semblaient pas l'atteindre. Il me bloqua rapidement et fermement les mains au dessus de la tête d'une main et les jambes avec les siennes, m'empêchant tout mouvement, alors que sa main libre vint claquer mon visage violemment. Je tombai dans les pommes immédiatemment.
~ ... ~
NIKITAA !Je me réveillais en sursaut, me demandant si ça n'avait été qu'un mauvais rêve. Malheureusement pour moi, il aurait été préférable que ce ne soit que cela. Je restais sur le dos à fixer le plafond, attendant que je sois pleinement réveillée. Les yeux fermés, je priais pour que tout ceci ne fut pas vrai, que j'allais me réveiller et retrouver ma famille mais surtout Nikita. Ce qui m'intriguait, c'était que toute ma famille avait passé l'arme à gauche, donc pourquoi étais-je toujours en vie ? Que voulait-il de moi ? Et qui était-il ?
Entendant du bruit derrière la porte, je me redressais et sautais sur mes pieds, prêt à affronter mon assaillant. Me postant derrière la porte avec une lampe à huile que je trouvais là, je l'attendis et le frappais de toutes mes forces dès qu'il eut entré. Mais mon geste n'eut pas l'effet escompté. Sans savoir comment, je me retrouvais plaquée contre le mur, le poignet presque cassé et ses lèvres à mon oreille alors que je commençais à me débattre.
_ Calme-toi Lana... Ca ne sert à rien de te battre contre moi... Je suis beaucoup plus fort.
Qui êtes-vous ? Que me voulez-vous ? Où sommes-nous ?_ Chaque chose en son temps, Aevtchoika*
Rapidement, il plongea ses lèvres dans mon cou et me mordis, m'arrachant un cri de surprise et de douleur. Je continuais de me débattre comme je le pouvais, bien que mes forces me quittaient au fur et à mesure qu'il prélevait mon sang. Il me jeta ensuite sur le lit, semi-consciente, et abusa de moi sans ménagement - je vous épargne les détails.
Cela dura plusieurs semaines, sans qu'il ne m'expliqua rien. Il venait deux fois par jour. Une fois pour me nourrir et la deuxième pour se nourrir lui. J'avais compris assez facilement qu'il n'avait rien d'humain même si je ne savais pas exactement ce qu'il était. Au début je comtinuais de me débattre, de le frapper jusqu'à ce que je n'en puisse plus mais plus les jours passaient, et moins je ne cherchais à me débattre. L'habitude certainement.
Un jour où je l'attendais sur le lit, genoux contre la poitrine, il ne me fit rien. Il prit une chaise et s'assit en face de moi, penché en avant, les coudes sur les genoux. Il me fixa ainsi sans rien dire et je ne le quittais pas des yeux également. A cet instant, j'eus le temps de l'admirer, longuement. Je me rendais donc compte qu'il était d'une beauté terrifiante. Son teint était pâle, ses cheveux d'un blond étincelant et ses yeux d'un bleu aussi envoûtant que les miens. Ne bougeant pas d'un poil, je continuais de l'observer, de l'admirer, sentant une vague de désir m'envahir. Je trouvais ça bizarre sur l'instant, mais je n'avais jamais été normale de toutes façons. Plus tard, les psychologues appelleront ça : le syndrôme de Stockholm.
_ Je vais enfin répondre à tes questions... Je pense qu'il est grand temps que je le fasse.
Il était temps en effet. Qui êtes-vous ?Evidemment, je ne perdais rien de mon caractère impétueux et j'étais loin d'avoir ma langue dans ma poche.
_ Appelle-moi Luka... Je suis ce qu'on appelle un vampire. Une créature de la nuit qui se nourrit de sang uniquement.
Un... Un vampire ?! Jamais entendu parlé de cela... Pourquoi avoir tué toute ma famille et m'avoir gardé en vie ?Là il ne répondit pas, se leva et vint me rejoindre sur le lit, m'allongeant. Je ne forçais plus, au contraire, je dois avouer que c'était la première fois que j'étais heureuse d'être en contact avec sa peau.
Finalement, cette situation demeura ainsi un long moment, des mois, je ne saurais dire combien exactement. Il commença à avoir confiance en moi, se rendant compte que je ne criais plus, je ne me débattais plus, et je lui offrais même mon sang et mon corps sans demander mon reste. J'étais sa "catin" personnelle. Il me laissait sortir pour faire des courses et je me faisais discrète. La rumeur courait qu'il y avait un tueur de nobles dans les parages. Je savais pas ce qu'il attendait de moi, mais je ne disais rien, je l'admirais en silence. Peut-être même avais-je désirais le sort que le destin m'avait réservé.
Le début de l'année 1601, scella mon avenir pour de bon. Luka qui avait pleinement confiance en moi, décida de me transformer, de me faire immortelle. Ce fut avec joie que j'acceptais son fabuleux cadeaux. Je n'étais pas femme à me laisser contrôler sans rien dire et il l'avait bien remarqué. Je pense que c'était même ce qui l'avait tant attiré en moi. J'étais sienne pour l'éternité, du moins je l'espérais.
Il m'apprit rapidement les rudiments de ma nouvelle race, comment chasser, comment séduire, comment être diabolique à souhait si tel était mon désir. Mais pour ce dernier, je n'avais pas eu grand chose à apprendre Je devais avoir un don naturel pour le sadisme. Mes premières victimes ont eu la chance de ne pas passer sous mes ongles affutés. Contrôlée par la soif, je ne prenais pas le temps de m'amuser, je me contentais de me nourrir.
Je vous passe le détail des premières années, rien de bien intéressant. J'avais suivis Luka sans rien dire, presque aussi docile qu'un petit chien. Les années passaient et se ressemblaient presque. Partout où nous passions, nous laissions un filet de sang, seules traces de nos victimes. Nous avions quitté St. Pétersbourg pour la Finlande, une petite ville non loin : Joensuu. Les journées paraissaient plus courtes et nous avions donc plus de temps pour nous amuser tous les deux. Ma jeunesse apparente m'aidait à côtoyer les jeunes sont soucis. Grâce à Luka, j'appris le français et l'anglais. Le temps était de notre côté et apprendre des langues étrangères dans ses conditions était plus facilement évidemment.
1789 : Paris, France.
Les mois passèrent, les années. Nous avions quitté la Finlande pour Paris et ses frasques. Aux yeux de tout le monde, j'étais la petite nièce de Luka, mais dans l'intimité, je retrouvais avec plaisir mon rôle d'amante passionnée. Cependant, nous fûmes trop vite séparés. Cette année-là c'était la révolution à Paris et les français étaient un peu sur les nerfs. Ils réclamaient moins de pouvoir au monarche, ou quelque chose de ce genre. Je n'étais pas très au fait de ce qu'il se passait, mais j'aurais du être plus attentive, plus méfiante.
La terreur fut fatale pour bon nombre de personnes, y comprit pour mon cher Luka. Nous vivions de ce que nous trouvons, et mes goûts de luxe n'ayant pas disparu, je lui en demandais toujours plus. Il pillait les grands de l'époque, faisant des victimes ici et là, et malheureusement, il fut arrêté. Il ne pouvait pas tous les tuer en un claquement de doigt, nous devions protéger notre couverture, notre race. Car nous n'étions pas les seuls, j'avais eu l'occasion d'en rencontrer quelques uns dans nos voyages. Maintenant, avec le recul, je pense qu'il ne voulait pas continuer. Il aurait très pu s'échapper des geôles où on le maintenait prisonnier mais il n'en fit rien. Je lui en voulais d'avantage pour ça. Crétin !
Il fut guillotiné sur la place publique quelques jours plus tard. J'avais assisté à la scène, à des dizaines de mètres de lui. Je savais qu'il me voyait, je sentais son regard sur moi. Rien. Pas un mot. Il me laissa ainsi me débrouiller pour les autres années à venir. M'avait-il aimé ou n'avais-je été qu'une distration pour lui dans sa longue vie d'immortel ? En attendant, pendant que je me posais des questions inutiles, je me retrouvais seule, dans un pays que je ne connaissais pas, avec une maitrise approximative de la langue. Mais j'apprendrais sur le tas, et je me trouverais bien quelque personne à côtoyer dans mon interminable deuil. Car oui, Luka avait été mon premier amour, celui que je n'oublierais jamais, celui qui m'avait offert le plus beau des cadeaux.
_ Le monde t'appartient désormais Lana !Une larme de sang coule sur ma joue alors qu'y repense. On passe plus de temps que nécessaire avec quelqu'un, on se lie profondément à cette personne et voilà qu'elle nous abandonne sans un mot, sans une explication, nous laissant seule face à nos propres choix, nos propres décisions. "Tu n'es qu'un idiot Luka ! Par ta faute, les autres paieront." Ce fut après ça que je devins plus sanglante, plus meurtrière. Et on ne se lasse pas facilement des bonnes choses.
Je vous passe les détails de ces derniers siècles. Rien de bien intéressant sous la lune. Je suis restée près d'un siècle en France, visitant les petites villes de Province et a observé la race humaine. J'étais maintenant si différente d'eux. Je l'avais toujours été en fait, mais quand je fréquentais les jeunes de ces villes, quand je "jouais" avec eux, je me rendais compte qu'ils étaient bien innocents, loin de se douter de ce mal qui subsistait au dehors.
J'avais changé de nom pour un qui passerait plus inaperçu que "Romanov". Je rencontrais quelques vampires dans mes voyages, mais aucun d'eux ne me parurent aussi intéressant que Luka. A part peut-être une anglaise du nom de Caitlin, une immortelle également. Je l'avais rencontré pendant un court séjour de deux semaines en Espagne. Nous nous étions découvert pas mal de point commun, comme l'histoire compliquée et passionnée avec nos créateurs et après cela nous ne nous étions pas quitté avant il y a peu. Nous sommes allées partout, nous adaptions à notre époque. Lorsque les femmes commencèrent à revendiquer leur droit, nous furent dans les premières à nous dévêtir sans gêne, ni pudeur, à fumer, à boire, à nous battre. A nous les robes et les jupes au dessus du genou. Depuis, je fumais et buvais toujours, mais seulement pour approcher les humains. Pas seulement pour me nourrir, mais aussi parce que je les trouvais marrants. Ils étaient toujours en train de se plaindre.
Puis il y avait quelques mois, j'avais décidé de retourner vers les pays dits du Nord. Caitlin n'avait pas voulu me suivre mais elle savait qu'elle pouvait me joindre quand elle voulait sur portable pour papoter. Elle savait aussi que si elle avait besoin d'aide pour quoi que soit j'étais là. En attendant, j'avais atterrit dans une petite ville d'Irlande, loin de me douter de ce qu'il se tramait par ici.